2.2 Tuberculose extrapulmonaire

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Sommaire

    À partir d’une localisation pulmonaire initiale (primo-infection), M. tuberculosis peut essaimer dans l’organisme au cours d’une phase silencieuse, en général peu de temps après la primo-infection (Chapitre 1). Une TB active peut se développer au niveau de nombreux autres organes, en particulier : ganglions lymphatiques, méninges, os et articulations, reins, organes génitaux et cavité abdominale.

     

    En raison d'un déficit relatif de l'immunité, les jeunes enfants, les personnes infectées par le VIH et les patients malnutris ont plus de risques de développer une TB extrapulmonaire (TBEP).

     

    Environ 16% des cas de TB dans le monde sont classés comme TBEP mais ce chiffre varie en fonction de l'épidémiologie locale [1] Citation 1. World Health Organization. Global Tuberculosis Report 2020. Geneva: World Health Organization; 2020.
    https://apps.who.int/iris/rest/bitstreams/1312164/retrieve
    .

     

    Un patient atteint de TBEP peut avoir en même temps une localisation pulmonaire (TBP), qu’il faut rechercher même si le diagnostic de TBEP est certain ou presque.

     

    Le Tableau 2.3, à la fin de ce chapitre, résume les caractéristiques de la TBEP.

    2.2.1 Tuberculose ganglionnaire

    La TB ganglionnaire est fréquente, en particulier dans certaines régions d’Afrique et d’Asie, notamment chez les enfants et les personnes infectées par le VIH.

     

    La TB ganglionnaire se présente comme une adénopathie non inflammatoire. Les ganglions sont froids et indolores, multiples (en général bilatéraux) ou uniques. Ils évoluent sur un mode chronique vers le ramollissement et la fistulisation. La localisation cervicale est la plus fréquente. Les localisations axillaires et médiastinales sont également fréquentes. D'autres localisations sont possibles.
    Le diagnostic peut être clinique mais chaque fois que possible, un échantillon de ganglion lymphatique doit être prélevé et testé (Chapitre 3).
    Les ganglions disparaissent habituellement dans les 3 mois qui suivent le début du traitement. Des réactions paradoxales sont possibles en début de traitement (apparition d’abcès, fistules, autres ganglions) mais ne doivent pas conduire à modifier le traitement.

     

    Les diagnostics différentiels peuvent être : cancers (lymphome, leucémie, tumeurs ORL, sarcome de Kaposi), autres infections (bactériennes, virales, mycobactéries non-tuberculeuses, toxoplasmose, infection par le VIH, syphilis, trypanosomiase africaine).

    2.2.2 Méningite tuberculeuse

    La méningite tuberculeuse est une forme grave de TB affectant les méninges. Elle est fréquente chez les enfants de moins de 2 ans et les personnes infectées par le VIH. Il s'agit d'une urgence médicale. Tout retard de diagnostic ou traitement peut entraîner des séquelles neurologiques irréversibles ou le décès du patient [2] Citation 2. Wang, M.G., et al., Treatment outcomes of tuberculous meningitis in adults: a systematic review and meta-analysis. BMC Pulm Med, 2019. 19(1): p. 200. 
    https://doi.org/10.1186/s12890-019-0966-8
    .

     

    L'évolution est en général subaiguë, insidieuse, sur une période de plusieurs jours ou semaines. Les symptômes sont : céphalées, irritabilité, fièvre, vomissements et altération de la conscience. Ils s’aggravent si le traitement est retardé. Le syndrome méningé (raideur de la nuque, hypotonie chez le nourrisson, photophobie et céphalées) est présent dans la plupart des cas. Le patient peut présenter une paralysie de la troisième paire crânienne (paralysie oculomotrice).

    Un échantillon de LCR doit être prélevé et testé (Chapitre 3). 

     

    Les principaux diagnostics différentiels sont les autres formes de méningites.

    2.2.3 Tuberculose osseuse et articulaire

    Jusqu'à 40% des patients atteints de TB osseuse et articulaire ont également une TBP [3] Citation 3. Qian, Y., et al., Characteristics and management of bone and joint tuberculosis in native and migrant population in Shanghai during 2011 to 2015. BMC Infect Dis, 2018. 18(1): p. 543.
    https://doi.org/10.1186/s12879-018-3456-3
    .

    TB du rachis (spondylodiscite ou Mal de Pott)

    La TB peut toucher les vertèbres et les disques. Elle provoque une destruction et une déformation du rachis. Le segment thoracique est le plus souvent touché.
    Une douleur dorsale localisée peut précéder de plusieurs mois l’apparition des premières anomalies radiologiques (destruction d’un disque intervertébral).
    Une protubérance vertébrale (gibbosité) due à la destruction et à la déformation des corps vertébraux peut être palpée.
    Des abcès froids paravertébraux et/ou des complications neurologiques sont possibles. 
    Un retard de diagnostic d’une TB du rachis cervical ou thoracique peut entraîner une paralysie.

    Arthrite

    La TB se manifeste le plus souvent une mono-arthrite chronique, débutant insidieusement, peu ou pas douloureuse, accompagnée de destructions articulaires. Les articulations les plus souvent touchées sont celles de la hanche, du genou, du coude et du poignet. 

    Ostéite

    L'ostéite peut être primitive, ou secondaire à une arthrite tuberculeuse. Elle affecte en général les os longs et s’accompagne parfois d’abcès froids. Comme l’arthrite, elle se distingue des infections à germes banals par l'expression de symptômes discrets malgré la présence de destructions osseuses et articulaires.

     

    Le diagnostic est basé sur l'interrogatoire du patient, l'examen clinique et la radiographie car la biopsie et la culture sont difficiles à réaliser dans de nombreux contextes. Un antécédent d’ostéite ou d’arthrite prolongée, associée à une altération de l’état général est en faveur d’une TB plutôt que d’une ostéomyélite bactérienne ou d’une brucellose. Le patient peut avoir un antécédent de non-réponse à un traitement antibiotique.

    2.2.4 Tuberculose urogénitale

    La localisation rénale est fréquente et peut rester longtemps silencieuse avant l’apparition lente de signes et symptômes : mictions douloureuses (dysurie) et fréquentes (pollakiurie), le jour et la nuit (nycturie) ; douleurs lombaires/abdominales ; sensibilité/œdème des testicules ou épididymite ou hématurie. En général, il y a peu de symptômes généraux tels que fièvre, sueurs nocturnes, malaise et perte de poids.
    Le diagnostic est suspecté devant une pyurie (leucocytes dans les urines) et souvent d'une hématurie micro- ou macroscopique ne répondant pas à un traitement antibiotique à visée urinaire.

    Un échantillon d'urine doit être prélevé et testé (Chapitre 3).

     

    Chez l’homme, la localisation génitale est secondaire à une localisation rénale. La manifestation la plus fréquente est une épididymite avec douleurs scrotales.

     

    Chez la femme, l’infection de l’appareil génital peut aussi se faire par voie hématogène. Les signes sont non spécifiques : douleurs pelviennes, leucorrhée, saignement vaginal anormal. La stérilité est souvent le motif qui amène les femmes à consulter.
    L’extension peut se faire vers le péritoine et provoquer une ascite.

    2.2.5 Tuberculose abdominale

    La TB abdominale se manifeste le plus souvent par une ascite résultant de la localisation péritonéale de l’infection.
    Une masse abdominale (souvent dans le quadrant inférieur droit), des douleurs et des diarrhées peuvent être présentes. La fréquence d'ascites chroniques d'étiologies différentes en région tropicale rend cette forme assez rare de TB difficile à diagnostiquer [4] Citation 4. Sinkala, E., et al., Clinical and ultrasonographic features of abdominal tuberculosis in HIV positive adults in Zambia. BMC Infect Dis, 2009. 9: p. 44.
    https://doi.org/10.1186/1471-2334-9-44

    Des symptômes généraux tels que fièvre, sueurs nocturnes, malaise, perte de poids peuvent être présents. L'accumulation d'ascite peut masquer la perte de poids.
    Un échantillon d'ascite peut être prélevé et testé. L'imagerie médicale peut contribuer à poser le diagnostic (Chapitre 3). 

    2.2.6 Pleurésie tuberculeuse

    L’épanchement pleural tuberculeux est l'une des formes les plus fréquentes de TBEP.
    Il est souvent asymptomatique, en particulier s'il est inférieur à 300 ml. Un essoufflement et des douleurs thoraciques (souvent unilatérales) apparaissent en cas d'épanchement important. Une toux accompagnée d'expectorations est présente en cas de TBP associée, ce qui est fréquent. 
    Des symptômes généraux tels que fièvre, sueurs nocturnes, malaise, perte de poids peuvent être présents. 
    L'épanchement peut évoluer vers un empyème tuberculeux, avec liquide purulent contenant de nombreux bacilles. L'empyème tuberculeux est souvent associé à une plèvre épaissie, cicatricielle et calcifiée.
    Un échantillon de liquide pleural peut être prélevé et testé. L'imagerie médicale peut contribuer à poser le diagnostic (Chapitre 3). 

    2.2.7 Péricardite tuberculeuse

    Les signes cliniques sont : douleurs thoraciques, essoufflement, œdèmes des membres inférieurs et parfois ascite.
    L’examen clinique peut montrer un frottement péricardique, une turgescence jugulaire, une tachycardie.
    L'imagerie médicale est l'élément clé du diagnostic (Chapitre 3). 
    Une péricardiocentèse peut être nécessaire en cas d’insuffisance cardiaque sévère avec défaillance hémodynamique. Elle ne peut être réalisée que par un opérateur expérimenté dans un hôpital correctement équipé, sous contrôle visuel échographique de préférence.

    2.2.8 Tuberculose cutanée

    La TB cutanée se présente sous forme de lésion(s) chronique(s), indolore(s), non pathognomoniques, allant d’une petite papule érythémateuse à de grands tuberculomes.
    Le diagnostic repose sur la culture à partir d'une biopsie.

     

    Références